
Depuis le début de la pandémie, de nombreux particuliers et entreprises sont parvenus à traverser la tempête grâce aux différents programmes d’aide gouvernementaux. Or, il est fort probable que certains devront envisager la faillite lorsque ces « coussins » ne seront plus accessibles. Dès lors, il est primordial de comprendre les différentes options qui s’offrent à eux.
Le terme « faillite » peut être considéré comme effrayant pour plusieurs. Les faillites et les restructurations sont effectivement perturbatrices. Elles peuvent cependant être bénéfiques pour les individus et pour l’économie puisqu’elles sont conçues pour préserver la valeur et empêcher le gaspillage d’actifs utiles. Nos clients ressentent souvent une certaine gêne, de la défaite voire une honte lorsqu’ils se retrouvent dans un contexte d’insolvabilité (incapacité de rembourser ses dettes). Ce sont des émotions tout à fait normales. Par contre, il faut savoir que la faillite vise à :
- Promouvoir la stabilité économique;
- Établir un équilibre entre la liquidation et la réorganisation;
- Assurer un traitement équitable entre les créanciers et;
- Garantir un processus transparent et prévisible.
Qu’est-ce que la faillite ?
Pour bénéficier de la protection de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité (L.f.i.), une personne doit être considérée comme “insolvable” au sens de la L.f.i. Une personne insolvable est définie comme une personne qui, n’étant pas en faillite, est endettée d’un montant de plus de 1 000 $, a cessé ou est incapable de remplir ses obligations au fur et à mesure qu’elles deviennent dues ou dont les biens ont une valeur nette d’actif qui n’est pas suffisante pour couvrir ses dettes. La faillite est donc la voie légale pour les personnes physiques ou morales qui souhaitent obtenir un allègement de ces niveaux de dettes impayables.
Lorsqu’une entreprise ou un particulier se trouve dans une telle situation, il peut :
I. Déposer une demande de faillite en vertu de la L.f,i., une procédure par laquelle les actifs du débiteur sont confiés à un syndic autorisé en insolvabilité à être liquidés pour distribution ultérieure aux créanciers. La L.f.i. prévoit également un mécanisme permettant aux personnes physiques ou morales d’éviter la faillite en négociant des accords avec les créanciers pour réorganiser les affaires financières du débiteur ; ou
II. Réorganiser la société insolvable, afin de compromettre les créances des créanciers au moyen d’un plan d’arrangement en vertu de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (L.A.C.C.) (cette option n’est toutefois disponible que pour les sociétés dont les dettes sont supérieures à 5 000 000 $).
Cet article portera principalement sur la L.f.i. pour les particuliers et les petites entreprises.
L’initiation du processus
Qu’il s’agisse d’une faillite personnelle ou d’une faillite d’entreprise, les procédures sont principalement les mêmes. Le processus est lancé soit par :
1) L’initiative volontaire d’une personne insolvable
Le débiteur cède ses biens au profit général des créanciers après avoir rempli les conditions suivantes :
i) La personne doit être insolvable au sens de la L.f.i., du fait qu’elle a cessé ou est incapable de remplir ses obligations au fur et à mesure qu’elles deviennent dues ou parce que la valeur nette de ses biens n’est pas suffisante pour couvrir ses dettes ;
ii) La personne insolvable doit soit faire affaire et résider au Canada, soit y détenir des biens;
iii) Les dettes de la personne insolvable doivent être d’un montant supérieur à 1 000 $ ; et
iv) La personne ne doit pas être déjà failli.
2) L’ouverture d’une procédure par un créancier (la faillite forcée)
Un créancier dont la « réclamation prouvable » est supérieure à 1 000 $ peut demander au tribunal de rendre une ordonnance de faillite à l’encontre de son débiteur en apportant des preuves que:
i) Il a une créance prouvable supérieure à 1 000 $ qui constitue une créance ordinaire (donc non-garantie);
ii) Le débiteur est défini comme une personne au sens de la L.f.i. qui, au moment où elle a commis un acte de faillite, résidait ou exerçait des activités au Canada ; et
iii) La personne insolvable a commis un “acte de faillite” tel que défini dans la L.f.i., dans les six mois précédant le dépôt de la demande.
3) L’échec d’une proposition ou d’un avis d’intention de déposer une proposition aux créanciers du débiteur.
Cette situation est liée à l’échec du processus de restructuration dans le cadre de la L.f.i.
Les étapes de la procédure de faillite
Après le lancement de la procédure de faillite, les étapes principales du déroulement du processus peuvent se résumer de façon suivante:
1) La personne insolvable devient failli pour les raisons précédemment énoncées (de façon volontaire ou forcée);
2) La personne insolvable doit remettre dans les cinq jours suivant la faillite, un bilan et une liste de ses créanciers au syndic;
3) Toutes les procédures entreprises par les créanciers de la personne insolvable sont suspendues, par contre en principe, les droits des créanciers garantis (exemple : les créanciers ayant une hypothèque sur les biens du débiteur) du failli ne sont pas touchés par la faillite;
4) Les créanciers sont avisés de la faillite et convoqués à une assemblée des créanciers;
5) Lors de cette première assemblée, les créanciers reçoivent un premier rapport du syndic, peuvent interroger le failli, confirmer ou changer de syndic et nommer des inspecteurs;
6) Le syndic reçoit et traite les preuves des réclamations, sous réserve des droits des créanciers insatisfaits d’en appeler au tribunal;
7) Les biens saisissables du failli sont vendus;
8) Le syndic distribue le produit net de la liquidation des biens du failli aux créanciers selon l’ordre de collocation prescrit dans la L.f.i.;
9) Enfin, le syndic demande la libération du failli au tribunal.
Notez que les petites entreprises qui ne sont pas constituées en société, telles que les entreprises individuelles ou les sociétés de personnes, seront traitées de la même manière qu’une faillite personnelle. En d’autres termes, les actifs de l’entreprise ne sont pas détenus indépendamment des actifs personnels du propriétaire de l’entreprise.
Pour les entreprises constituées en société qui déposent leur bilan, les propriétaires sont protégés de toute responsabilité, et seuls les actifs de l’entreprise seront confisqués. Toutefois, cette règle trouve exception lorsque le propriétaire a mis en place des biens personnels, tel qu’une maison, en garantie ou en sûreté de l’une des dettes de l’entreprise. De plus, les administrateurs d’une société peuvent également être tenus personnellement responsables de certaines dettes gouvernementales impayées.
Les désavantages de la faillite
Une idée fausse, mais courante veut qu’une fois libéré de la faillite, le failli soit libéré de toutes dettes antérieures. En vérité, il y a certaines dettes dont il ne sera jamais libéré, notamment les amendes, la pension alimentaire, la fraude, la responsabilité pour une créance qui n’a pas été divulguée au syndic et les dettes d’études. De plus, dans le cas de faillite d’une entreprise, la société ne peut demander la libération tant qu’elle n’a pas entièrement satisfait à toutes les demandes de ses créanciers.
Une fois sortie de la faillite, la cote de crédit de l’individu sera très faible. Cela peut entraver sa capacité à obtenir des cartes de crédit, des hypothèques ou des prêts pendant des années. Après une première faillite, un dossier peut être conservé sur un rapport de crédit jusqu’à 6 ans, et pour toute faillite ultérieure, pendant une durée de 14 ans.
En outre, un failli ne peut pas être administrateur d’une société et certains ordres professionnels interdisent aux faillis non libérés d’exercer la fonction d’administrateur.
Les avantages de la faillite
L’un des principaux avantages de la faillite est de donner au débiteur du temps et de l’espace. La suspension automatique des procédures empêche les créanciers de prendre des mesures pour recouvrir la dette. Cela met donc un terme aux expulsions, saisies et longues procédures judiciaires qui peuvent être éprouvantes.
Bien qu’une faillite reste enregistrée pendant un certain nombre d’années, ce temps peut être mis à profit pour améliorer sa cote de crédit et apprendre à vivre avec ses revenus afin d’éviter de futurs problèmes financiers. À travers ce processus, le failli apprendra également, grâce à des conseils en matière de crédit obligatoires d’un conseiller qualifié qui a obtenu un certificat du Bureau du surintendant des faillites, comment reconstruire son crédit et acquérir de nouvelles habitudes financières efficaces.
L’avantage pour les créanciers est que la Loi sur la faillite et l’insolvabilité (LFI) prévoit des protections solides, en obligeant les débiteurs à divulguer des informations importantes sur leurs opérations et en imposant des contrôles stricts sur les actions du débiteur. Par conséquent, il est plus probable qu’un créancier récupère sa créance par le biais de la procédure de faillite plutôt que par la procédure judiciaire.
La faillite ne devrait pas toujours être vue comme un échec, mais comme une chance pour un nouveau départ. Que vous soyez un particulier ou une société, veillez à peser soigneusement toutes vos options avant de faire faillite et contactez un professionnel pour vous assister dans la matière.
Mise en garde : Le présent document donne un aperçu des procédures d’insolvabilité au Canada et n’a pas pour but de communiquer des conseils spécifiques applicables à une situation factuelle particulière. Les lecteurs sont mis en garde contre la prise de décisions fondées uniquement sur ce document. Ce document ne doit pas être utilisé comme substitut à un avis professionnel sur les circonstances d’un cas particulier.