
Le gouvernement du Québec a ordonné, le lundi 23 mars, la fermeture de tous les commerces et entreprises n’octroyant pas de services essentiels. Si vous êtes locataire d’un local commercial et que vous êtes visé par cette interdiction, il se pourrait que vous soyez libéré de votre obligation de payer votre loyer durant la période où vos locaux devront être fermés.
Le contrat de location
Au Québec, l’article 1854 du Code civil du Québec expose l’obligation principale du locateur, soit celle de procurer à son locataire la jouissance paisible des lieux loués pendant toute la durée du bail :
1854. Le locateur est tenu de délivrer au locataire le bien loué en bon état de réparation de toute espèce et de lui en procurer la jouissance paisible pendant toute la durée du bail.
Il est aussi tenu de garantir au locataire que le bien peut servir à l’usage pour lequel il est loué, et de l’entretenir à cette fin pendant toute la durée du bail.
En contrepartie à cette obligation, le locataire est tenu au paiement du loyer convenu :
1855. Le locataire est tenu, pendant la durée du bail, de payer le loyer convenu et d’user du bien avec prudence et diligence.
La force majeure et la libération de l’obligation corrélative
En vertu de l’article 1693 du Code civil du Québec, lorsque le débiteur d’une obligation ne peut l’exécuter en raison d’une force majeure, il est libéré de son obligation.
La force majeure est, tel que défini à l’alinéa 2 de l’article 1470 du Code civil du Québec, un évènement imprévisible et irrésistible (c’est-à-dire qu’on ne peut empêcher). Même si chaque cas dépend de ses propres circonstances, nous pouvons raisonnablement concevoir qu’un locateur qui, à la suite des dernières mesures gouvernementales, n’est plus en mesure de procurer la jouissance des lieux loués ne peut plus le faire en raison d’une force majeure.
Toutefois, l’article 1694 du Code civil du Québec, ainsi que la jurisprudence à cet effet, mentionnent que si le débiteur (en l’espèce le locateur) est libéré de l’exécution de son obligation en raison d’une force majeure, il ne peut exiger l’exécution de l’obligation corrélative (en l’espèce payer le loyer) de son créancier :
1694. Le débiteur ainsi libéré ne peut exiger l’exécution de l’obligation corrélative du créancier; si elle a été exécutée, il y a lieu à restitution.
Lorsque le débiteur a exécuté son obligation en partie, le créancier demeure tenu d’exécuter la sienne jusqu’à concurrence de son enrichissement.
La force majeure et la résiliation du bail
Le locataire pourrait même obtenir la résiliation d’un bail commercial s’il ne peut pas utiliser les lieux loués à la fin prévue, par exemple parce qu’une mesure gouvernementale lui prohiberait l’utilisation des lieux loués. Cependant, une telle résiliation ne pourra être que judiciaire, c’est-à-dire qu’elle devra être prononcée par un tribunal, et ce sur preuve d’un préjudice sérieux.
Toutefois, considérant que ce genre de demande n’est pas instruite en urgence pour le moment, le locataire qui cherche à obtenir la résiliation de son bail risque de ne pouvoir présenter sa demande qu’après la situation actuelle.
Le bail
Avant de déterminer si vous pouvez invoquer la libération de votre obligation corrélative, il faudra vérifier si vous avez dérogé, dans votre bail, aux principes généraux de droit civil énoncés ci-haut.
En effet, il se peut que vous ayez stipulé dans votre bail qu’aucun cas de force majeure ne peut vous libérer de votre obligation de paiement de loyer. Dans un tel cas, cette clause l’emporterait sur le droit civil à moins que, selon les circonstances, elle ne soit invalide. Ce serait le cas, par exemple, d’une clause abusive dans un contrat qui vous a été imposé « contrat d’adhésion ».
De plus, il se pourrait que votre bail comporte d’autres clauses pertinentes à votre situation actuelle (par ex., une clause de renégociation de loyer, de libération de certaines obligations, de résiliation de bail, etc.).
Conclusion
La pandémie de la COVID-19 a entraîné récemment des mesures gouvernementales ordonnant la fermeture de certains locaux commerciaux. À notre avis, cette situation en est une de force majeure.
Ainsi, elle libère les locateurs concernés par cette fermeture de leurs obligations de procurer la jouissance paisible des lieux qu’ils louent. Par conséquent, les locataires pourraient refuser, dans une mesure correspondante, d’exécuter toute obligation corrélative, soit celle de payer le loyer.
Finalement, il est crucial d’examiner son bail commercial avant d’entamer quelconque action, et ce afin de vérifier si vous n’avez pas dérogé contractuellement au droit en vigueur.
Nous sommes là pour vous accompagner dans vos démarches :
1. Examiner votre bail commercial : Nous nous assurerons de faire une analyse juridique complète de votre bail.
2. Vous faire un compte-rendu de la situation entourant vos droits et obligations : Nous vous fournirons un exposé clair de la situation juridique entourant votre bail dans les 48 heures ouvrables suivant l’envoi de votre demande.
3. Le cas échéant, notifier votre locateur de l’ensemble de vos droits : Si cela s’applique à votre situation, nous ferons parvenir une lettre à votre locateur afin de faire valoir vos droits dans les 48 heures ouvrables suivant l’envoi de votre demande.